Il y a soixante ans, en septembre 1964, sortait Le Gendarme à Saint-Tropez. Le musée de la gendarmerie et du cinéma en profite pour mettre le focus sur ce premier épisode et son interprète principal Fufu.

Textes : Yan Harcourt Photos : © Droits réservés – Collection La Cinémathèque française – Marcel DOLE

Un banal fait divers devenu comédie

Le début d’une saga en six épisodes qui marquera des générations de spectateurs en France comme à l’étranger jusqu’à ressurgir sur le rayonnement de Saint-Tropez hors de nos frontières dans le prolongement du mythe Bardot. Et pourtant, le premier épisode part d’un banal fait divers raconté au réalisateur Jean Girault par un ancien journaliste de France-Soir. En vacances dans le golfe, ce dernier se fait voler sa caméra et devant le peu « d’enthousiasme » de la maréchaussée tropézienne pour interpeller le voleur, il s’en amuse au point de communiquer son enthousiasme à Jean Girault qui en tire un scénario. Girault pense immédiatement à prendre pour « héros » celui qui vient de tourner pour lui Pouic-Pouic, Louis de Funès. Il réunit atour de lui une bande de « ringards qui ne coûtent pas cher ». Et voici le Gendarme de Saint-Tropez en boîte avec Galabru & co. Si les intérieurs de la célèbre gendarmerie sont reconstitués en studio à Nice, demeurent toutes les scènes en extérieurs des plages de Pampelonne aux séquences sur le port et les routes du golfe, notamment à bord de la Ford Mustang rouge qui est au centre de l’exposition tropézienne cet été. « Le film est un très beau souvenir ! C’était quand même mon premier «  grand rôle  » en jeune premier ! », plaisante le natif de Marseille Patrice Laffont qui, après une audition fructueuse, fut de l’aventure en soupirant de la fille de Cruchot.

De Funès face aux incartades

Et le futur animateur Des chiffres et des lettres de poursuivre « On était toute une bande de jeunes comédiens qui ne pensaient qu’à déconner ! Louis de Funès fulminait. Il ne nous fréquentait pas et ne nous disait même plus bonjour après quelques incartades en plateau, car pour lui nous n’étions pas professionnels », s’amuse encore Patrice Laffont qui n’explique pourtant toujours pas son retrait de la série… « Je n’en ai aucune idée, car à la fin du premier épisode, pour le défilé sur le port, j’étais tout de même avec Geneviève Grad (Nicole Cruchot, Ndlr) devenue ma femme, avec nos jumeaux dans les bras. Donc je m’étais dit, s’il y a une suite j’en serai. J’imagine que nous avons dû divorcer avant Le Gendarme à New York ! », ironise-t-il.

Le « petit fils de Cruchot » toujours Tropézien

Il se trouve que bien des années plus tard cet heureux passé ressurgira sous les traits d’un Tropézien… « J’ai aperçu Patrice Laffont en pleine partie de boules Place des Lices. Je lui ai lancé «Vous me reconnaissez ?». Il m’a répondu que «Non». Mais lorsque je lui ai rappelé qu’il nous tenait dans ses bras quelques décennies plus tôt, il a souri et m’a salué », raconte Jean-François Taïs aujourd’hui retraité installé face à la célèbre gendarmerie (son frère Jean-Michel réside en Provence Verte). Son enthousiasme à raconter cet épisode qui a marqué sa vie ne faiblit pas. « Le bruit courait que la production recherchait des bébés pour le générique final. Mon père était boulanger rue Clemenceau et les informations circulaient vite. Le fait qu’avec ma mère il ait eu des jumeaux est revenu aux oreilles de la production et voilà comment nous nous sommes retrouvés le temps de la parade des gendarmes dans les bras de Geneviève Grad et Patrice Laffont ! », conclut-il. Le succès est tel – plus de 7 millions d’entrées ! – qu’un second opus réalisé à peine un an plus tard, Le Gendarme à New-York, voit la brigade locale s’envoler aux États-Unis pour représenter la France à un congrès international de la gendarmerie…

Des millions de spectateurs

L’affluence en salles est moindre (4 millions d’entrées), mais la comédie plaît et se poursuit avec Le Gendarme se marie en 1968. Bousculé par les grèves, le film qui voit Ludovic Cruchot convoler en justes noces est un nouveau succès retentissant. Un 4e opus est commandé. Ce sera Le Gendarme en balade qui se nourrit des gags produits par la « mise en retraite » de la brigade bien décidée à continuer malgré tout ses interventions… Le plateau de tournage étant envahi par les touristes curieux, l’équipe déménage à Hyères, dans la caserne du 405erégiment d’artillerie antiaérienne. De Funès ayant une santé fragile, il faudra attendre neuf ans pour voir Le Gendarme et les extra-terrestres, confrontation loufoque avec des aliens venus étudier la Terre qui attirera plus de six millions de spectateurs. Suivra enfin, Le Gendarme et les gendarmettes, souvent vu comme « l’épisode de trop » malgré l’arrivée de nouvelles recrues féminines dont Babeth Hallyday. Il sera aussi le film posthume de Louis de Funès qui aurait eu 110 ans cette année.

Reconstitution d’une époque

«  Avec cette exposition temporaire, nous avons voulu reconstituer une époque, avec des photos inédites, vidéos, mannequins, costumes, anecdotes, lieux de tournage, etc.  », précise la directrice Laurence Durieux qui donne rendez-vous au musée de la place Blanqui jusqu’en mars 2025 pour revenir au temps des yé-yé et des nudistes «  pourchassés  ».

« The Gendarme, » a Made in Saint-Tropez saga that became a global success

Sixty years ago, in September 1964, « The Gendarme of Saint-Tropez » was released. The Gendarmerie and Cinema Museum takes advantage of this anniversary to focus on this first episode. It marked the beginning of a saga in six parts that would captivate generations of viewers in France and abroad, further enhancing Saint-Tropez’s international reputation following the Bardot myth. From the outset, the misadventures of the local gendarmerie brigade, with Louis de Funès as the hero chasing nudists, elicited continuous laughter, attracting over seven million viewers in France alone. A second installment, « The Gendarme in New York, » released just a year later, sees the local brigade flying to the United States to represent France at an international gendarmerie congress… While attendance in theaters was lower (4 million admissions), the comedy was well-received and continued with « The Gendarme Gets Married » in 1968. The film, featuring Ludovic Cruchot tying the knot, was another resounding success. A fourth installment was commissioned. This became « The Gendarme on the Move, » which drew on gags stemming from the brigade’s « retirement » but determination to continue its interventions nonetheless… It would be nine years before « The Gendarme and the Extra-Terrestrials, » a wacky confrontation with aliens studying Earth, attracted over six million viewers. Finally, « The Gendarme and the Gendarmettes, » often seen as the « episode too many, » followed. It would also be Louis de Funès’ posthumous film, as he would have turned 110 this year. « With this temporary exhibition, we wanted to recreate an era, with unpublished photos, videos, mannequins, costumes, anecdotes, filming locations, etc., » explains director Laurence Durieux, inviting visitors to the museum on Place Blanqui until March 2025.

MUSÉE DE LA GENDARMERIE ET DU CINÉMA 2 Pl. Blanqui, Saint-Tropez – www.saint-tropez.fr